Arabie Saoudite et Canada : droits de l'homme et expulsion d'ambassadeurs
- Forum des Affaires Mondiales
- 1 sept. 2018
- 3 min de lecture
La querelle a commencé avec la publication le 2 août dernier d’un tweet de Chrystia Freeland, la ministre Canadienne des Affaires Étrangères, qui s’inquiétait de l’arrestation de Samar Badawi. Elle appelait Riyad à libérer la militante des droits des femmes, ainsi que son frère, le blogueur Raif Badawi, détenu par les autorités saoudiennes depuis 2012.
En représailles, l’Arabie Saoudite a décidé entre autres, d’expulser l’ambassadeur canadien de son sol, de rappeler son ambassadeur du Canada et de geler le commerce et les investissements avec le pays nord-américain.
Malgré cette soudaine réaction, le Canada, fidèle aux valeurs défendues par Justin Trudeau et malgré le silence assourdissant des autres démocraties occidentales, continuera à défendre les droits des personnes. « Que les choses soient bien claires pour tout le monde ici et pour les Canadiens qui nous suivent ou nous écoutent : le Canada défendra toujours les droits humains au Canada et dans le reste du monde », a déclaré Chrystia Freeland.
Les conséquences économiques
Les conséquences économiques semblent pour l’instant mineures, l’Arabie Saoudite étant un petit partenaire économique du Canada. En effet, les échanges commerciaux entre les deux pays ne pèsent que 4 milliards de $ et les exportations vers l’Arabie Saoudite ne représenteraient que 0.24% des exportations canadiennes, d’après les chiffres du gouvernement canadien. Mohammed Ben Salmane (MBS) ne risque donc pas grand-chose à compromettre les relations diplomatiques avec le Canada.
Mais la détérioration soudaine des relations entre les deux pays met sérieusement en danger le contrat de 15 milliards $ signé en 2014 qui permet à la firme General Dynamics Land Systems (GDLS) de fournir des véhicules blindés aux forces saoudiennes. En cas d’annulation du contrat, ce pourrait être un vrai coup de massue abattu sur la tête des habitants de la région de London, Ontario pour qui General Dynamics représente le plus gros employeur.
Représailles sur les étudiants et les patients
En plus des conséquences économiques attendues, Riyad a fait savoir sa décision de transférer des patients et des étudiants saoudiens hors du Canada. Ainsi, les autorités saoudiennes auraient contacté des universités américaines pour qu’elles accueillent des Saoudiens étudiant au Canada. On parle de quelques 16 000 Saoudiens étudiant au Canada qui verraient leur vie chamboulée et leur diplomation en danger. Au-delà des répercussions économiques, on pense aussi et surtout aux drames humains que vivront ces ressortissants.
Les droits des femmes toujours bafoués
La nomination de MBS au titre de prince héritier le 21 juin 2017 avait fait souffler un vent d’espoir pour les citoyens saoudiens: réformes, fin du rigorisme religieux, droits des femmes, etc. Au programme, sa progressiste « Vision 2030 », un programme ambitieux de réformes et de modernisation pour l’après-pétrole.
Dans le cadre de ce vaste plan de modernisation et sans doute pour redorer un peu l’image de ce pays autoritaire, MBS a levé l’interdiction qu’avaient les Saoudiennes de conduire en juin dernier. Cependant, un mois auparavant, une dizaine de militantes pour les droits des femmes avaient été accusées d’entretenir des rapports avec des forces étrangères hostiles, et avaient été incarcérées. L’activiste Samar Badawi avaient milité contre le système de tutelle imposé aux femmes et avait fait campagne pour la libération de son frère. "La détention de Samar Badawi montre une fois de plus la détermination de l'Arabie Saoudite à faire taire ceux qui ont le courage de parler des droits de l'Homme et des réformes", avait souligné la directrice de l’ONG Human Rights Watch. D’autres militantes semblent en plus mauvaise posture, comme la jeune activiste Israa AL-Ghomgham, qui elle, risque la décapitation.
* Utilisation du masculin pour alléger le texte.
Paola Cura
Sources :
· Les Saoudiens se tournent vers les État-Unis, et La démocratier, nécessaire à la croissance? LeDevoir.
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