Le rapport alarmant de Médecins Sans Frontières quant à la situation frontalière au sud du Mexique
- Margaux Dhuicq
- 25 sept. 2017
- 3 min de lecture
Nouveau rapport, vieille situation. Le rapport de Médecins Sans Frontières (MSF) publié fin mai et intitulé « Forcés de fuir le triangle nord de l’Amérique centrale : une crise humanitaire négligée », alerte une nouvelle fois sur la crise migratoire sans précédent que connaît le « Triangle nord » de ce continent : l’Honduras, le Salvador et le Guatemala.
Déjà rapportée en septembre 2016 par Amnesty International, la situation au sud du Mexique n’a fait qu’empirer ces derniers mois. Allant jusqu’à prendre des allures de chaos depuis le renforcement du « Plan Frontière Sud » au Mexique, resserrant les mesures de sécurité et amenant les migrants à choisir des routes plus clandestines et dangereuses.
Risquer sa vie et sa santé pour fuir. Pour ceux qui viennent des régions les plus reculées de ce Triangle nord, ce sont plus de 3 000 km à parcourir et trois pays entier à traverser. Il est également courant de voir des gens sillonner ces pays pour la deux ou troisième fois, toujours en empruntant des chemins parallèles aux voies de chemin de fer pour fuir les autorités. Or ces territoire sont gardés par des gangs et narcotrafiquants, et comme deux populations sillonnent les mêmes routes, les conséquences physiques et morales pour les migrants révèlent d’inadmissibles violences : témoignages de kidnapping, de viol, de torture et de coups se succèdent.
« J’ai honte de le dire, mais j’aurai préféré qu’ils me tuent » avoue une hondurienne de 35 ans, séquestrée avec une de ses connaissances alors qu’elle effectuait pour la quatrième fois la route vers le Mexique et les Etats-Unis. Une phrase qui illustre l’ampleur des violences que peut subir la population migrante sud américaine. Violée avec un couteau sous la gorge pour l’empêcher de résister, elle en arrive à dire que la mort aurait été une meilleure option. Hélas, des témoignages comme celui-ci, MSF en recueille des centaines ... les chiffres parlant d’eux-mêmes. Sur 467 personnes interrogées :
68,3% ont déclaré avoir été victimes de violence durant leur transit au Mexique ;
Presque un tiers des femmes affirment avoir subi des sévices sexuels ;
Au total, ce sont 92,2 % des migrants et réfugiés suivis par les équipes de MSF en 2015 et 2016 qui ont vécu un événement violent dans leur pays d’origine ou durant leur déplacement. (source : msc.ca/mexique)
De nouvelles causes d’exil. Malgré tous ces indicateurs, ces migrants venant du Triangle du nord sont encore souvent vus comme des migrants économiques cherchant des opportunités et niveaux de vie auxquels ils n’auraient pas accès chez eux. Comme le décrit Bertrand Rossier, chef de mission de MSF au Mexique, la population migrante serait surtout composée de personnes « vulnérables et terrorisées », fuyant majoritairement le joug des gangs, des narcotrafiquants et la corruption. A cela s’ajoute les dernières politiques migratoires mises en place par les Etats-Unis et le Mexique, qui font l’objet de controverses : n’ayant « ni [freiné] le trafic ni la contrebande », elles auraient au contraire aggravé la situation déjà instable dans la région.
Une aide qui s’adapte. MSF est présent au Mexique depuis 2012 et dispense aux réfugiés du Triangle nord des soins médicaux et une aide psychologique. A la vue des événements politiques récents et des décisions territoriales des dernières années, MSF a opté pour de nouvelles stratégies d’interventions au sein de foyers et de cliniques mobiles le long des voies ferrées. En 2016, un centre médical d’une nouvelle génération a même vu le jour à Mexico, ayant pour objectif d’accompagner et de soigner les migrants victimes de violences extrêmes.
L'entretien des peurs de l’opinion publique. Enfin, MSF met en garde contre les idées-reçues et les décisions extrêmes. Rappelant que, de son point de vue, les réfugiés restent des être humains et que la situation actuelle dans le Triangle nord mérite à la fois l’attention complète de la communauté internationale et l’implication totale des acteurs concernés. Une situation « urgente » (B. Rossier) qui nécessite un accueil « international », pour des populations ayant connu des « violences implacables et souffrances émotionnelles » proches de celles rencontrées dans les zones de conflits les plus terribles de la planète.

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